Le rôle des parents dans la rééducation orthophonique de leur enfant DYS

5 idées reçues à dépasser

Lorsque son enfant présente un trouble DYS, la prise en charge orthophonique apparaît souvent comme une réponse rassurante, structurée, professionnelle.

Les parents ont alors tendance à s’effacer, pensant que leur rôle s’arrête à l’organisation pratique : prendre les rendez-vous, accompagner, rassurer.

Pourtant, leur présence active dans le parcours de rééducation est déterminante. Encore faut-il savoir comment agir, sans se tromper de posture.

Voici cinq erreurs courantes que font de nombreux parents — et les leviers concrets pour les dépasser.

1. Croire que « l’orthophoniste s’en occupe, ce n’est pas mon rôle »

Pourquoi cette idée revient souvent :
Confier son enfant à une orthophoniste spécialisée, c’est un soulagement. Elle connaît les méthodes, elle sait comment agir, elle a de l’expérience. Il est donc tentant de se dire que l’essentiel se joue pendant les séances, et que le reste du temps, l’enfant a simplement besoin de repos.

Pourquoi cette logique ne suffit pas :
Un suivi hebdomadaire, aussi sérieux soit-il, représente à peine 1 à 2 heures sur les 168 que compte une semaine.

Ce qui se joue à la maison — l’exposition au langage, la régularité, la confiance dans l’effort — a un poids bien supérieur. Sans relais dans le quotidien, les progrès risquent de rester limités ou de ne pas se stabiliser.

Astuce pratique :
Réserve chaque jour 5 à 10 minutes de « temps langage ». Pas pour refaire une séance, mais pour échanger autour d’un livre, d’un mot compliqué croisé dans la journée, ou d’un jeu de mots. Ces petits rituels renforcent ce qui a été vu en séance, sans pression.

 

2. Vouloir « rejouer la séance » à la maison

Pourquoi cette idée est séduisante :
Certains parents pensent qu’il faut absolument réviser les exercices vus en orthophonie. Ils veulent bien faire, s’impliquer, montrer à leur enfant qu’ils s’intéressent à ses progrès.

Pourquoi cette approche est souvent contre-productive :
L’enfant ne perçoit pas son parent comme un thérapeute. Reproduire les exercices à l’identique peut générer de la confusion, de la résistance ou un sentiment d’envahissement. La maison reste un lieu affectif, pas un cabinet bis.

Astuce pratique :
Transforme un exercice vu en séance en activité ludique ou quotidienne. Par exemple, si l’enfant travaille sur les sons [f] et [v], propose un défi : « On fait une pizza avec des ingrédients qui contiennent le son [f] ! ». L’objectif reste le même, mais le contexte est plus motivant.

 

3. Penser que seuls les temps « éducatifs » comptent

Pourquoi cette erreur est fréquente :
L’éducation est souvent perçue comme une suite de moments formels : les devoirs, les leçons, les séances spécialisées. Le reste — les repas, les trajets, le bain — semble déconnecté de l’apprentissage.

Pourquoi c’est une vision trop restreinte :
Les enfants DYS ont besoin de répétition, de consolidation, de transfert dans la vie réelle. Or, ce sont justement les contextes du quotidien qui offrent ces opportunités : nommer les objets, raconter ce qu’on voit, décrire ce qu’on fait… Apprendre devient un fil continu, intégré dans la vie.

Astuce pratique :
Choisis un moment-routine (par exemple, le trajet de l’école ou le moment du dîner) pour introduire un petit jeu oral. Cela peut être : « Donne-moi un mot qui commence par le son [ch] » ou « Raconte-moi ta journée en trois phrases ». Rien d’imposé, juste une invitation régulière à manipuler le langage.

 

4. Corriger systématiquement les erreurs

Pourquoi on tombe facilement dans ce réflexe :
Les parents veulent éviter que de « mauvaises habitudes » s’installent. Chaque faute semble être une menace pour la progression. Le réflexe est donc de corriger, encore et encore.

Pourquoi ce réflexe peut freiner l’apprentissage :
À force de corrections, l’enfant peut perdre confiance, se décourager, se taire. L’erreur fait pourtant partie intégrante du processus d’apprentissage, surtout dans les troubles DYS. Ce n’est pas l’absence d’erreurs qui compte, mais la capacité à comprendre, à tester, à corriger soi-même.

Astuce pratique :
Adopte la reformulation bienveillante. Si ton enfant dit « J’ai écouté une histoi », tu peux répondre : « Ah, tu as écouté une histoire ? Elle parlait de quoi ? » Tu montres le bon mot sans insister sur la faute, tout en valorisant l’échange.

 

5. Penser qu’il faut être expert pour aider efficacement

 

Pourquoi cette impression est tenace :
Le jargon médical, les bilans, les diagnostics… tout cela peut créer une distance. Certains parents se sentent dépassés, pas assez compétents pour intervenir. Le risque, c’est de se retirer, pensant ne pas avoir les « bonnes clés ».

Pourquoi c’est faux — et culpabilisant :
Tu n’as pas besoin de tout comprendre pour être un parent soutenant. Ta présence, ta régularité, ta capacité à valoriser l’effort comptent bien plus que ta maîtrise des classifications ou des stratégies cognitives. C’est le lien affectif et sécurisant que tu offres qui permet à ton enfant de se sentir capable de progresser.

Astuce pratique :
Autorise-toi à dire que tu ne sais pas — et cherche la réponse avec ton enfant. Ce message est très puissant : « On apprend ensemble ». Il donne à ton enfant l’exemple d’un adulte curieux, imparfait, engagé. C’est un modèle bien plus formateur qu’un expert distant.

 

En conclusion

Être parent d’un enfant DYS, c’est apprendre à jouer un rôle subtil : présent mais pas intrusif, soutenant mais pas surinvesti. Il ne s’agit pas d’enseigner, mais d’accompagner. De rendre possibles les conditions du progrès : confiance, régularité, plaisir. Tu n’as pas besoin d’être parfait·e, juste disponible, faire preuve d’attention et d’un peu de créativité.

Chaque geste compte. Chaque moment partagé peut devenir un pas de plus dans le chemin de ton enfant.